Le chêne et l'olivier [Paul Nevada]

Il ne me faut pas trop veiller ce soir. Je dois me lever tôt demain, mais je répugne à aller au lit, dans ce lit particulièrement, où j’ai vécu de si heureux moments avec toi. Je sais que maintenant, je ne pourrai plus te regarder dormir, je ne verrai plus ta poitrine se lever et descendre au rythme de ta douce respiration… Tu occupes toutes mes pensées. La nuit, je rêve de toi, de ce que nous vécûmes…
Judith…

Extrait du journal de l’Inspecteur William McBurrough
sujet de Sa Majesté la Reine Victoria

Le vide et le froid. Telles étaient les premières impressions de William au sortir du lit. Vide, car ce lit avait autrefois accueilli Judith, et froid, car il ne sentait plus la chaleur de son corps chaud lorsqu’ils étaient enlacés. Repoussant les draps, le jeune homme se leva et alla à la fenêtre tirer les rideaux. Le ciel était gris. Ils seraient chanceux si la pluie ne tombait pas dans la journée… Mais la météo aimait bien mouiller les Londoniens, et au nord, le ciel était bien noir.

Aujourd’hui était un grand jour pour lui. Il avait eu son diplôme voilà deux jours maintenant, et commençait enfin son travail, comme tous ses camarades de promotion. William fit ses ablutions matinales, se rasa, et s’habilla. Il portait aujourd’hui des vêtements noirs… Comme d’habitude… Sa garde-robe ne possédait que cette couleur, particulièrement depuis la mort de Judith. Il prit sa plaque et la rangea dans une poche de poitrine avant de sortir.

Fichu temps. Dans l’intervalle entre son réveil et son départ, la pluie s’était mise à tomber. Pas encore très fort, mais il serait trempé avant d’arriver à Westminster. Et il n’avait pas d’argent à gaspiller pour une calèche. Tant pis. Remontant son col, William prit la direction de ce quartier de Londres. Il n’avait que trop tarder, et s’il arrivait en retard pour son premier jour, cela lui collerait une assez belle étiquette qu’il aurait du mal à enlever.

« Will ! Hé, Will ! »

« Thomas, comment ça va ? »

Thomas Jackson était l’un des membres de sa promotion. Quittant son caractère pensif qui l’avait accompagné jusque là, l’Ecossais retrouva son côté boute-en-train que les autres connaissaient tant. En souriant, il alla serrer la main à son… Oui, son confrère désormais, son collègue de travail.

« Ça va ça va, même si je ne trouve pas l’Inspecteur avec qui on m’a placé. »

« Sur qui es-tu tombé ? »

« Un Mc quelque chose je crois. McAskett il me semble. »

« Avec un nom comme ça, il ne doit pas passer inaperçu… Allez, je vais te laisser, le mien doit se trouver dans les parages. »

Les deux amis se saluèrent avant de se séparer. William vérifia sur sa lettre le nom de l’Inspecteur avec qui on l’avait placé pour parfaire sa formation. Paul Nevada. Le nom ne lui disait absolument rien, mais il espérait que l’homme était assez sympathique. Travailler avec un renfrogné n’était pas ce qu’il préférait.

Bon, le quartier général de la Police était grand, et il y avait beaucoup de gens à l’intérieur. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin, d’autant plus qu’il ne connaissait pas le visage de son tandem. Et courir dans les couloirs en criant son nom n’était pas une bonne idée. Peut-être que le garde là-bas pourrait l’aider ? Bonjour Monsieur, où se trouve l’Inspecteur Paul Nevada ?… Là-bas ? D’accord, merci beaucoup………… Là-bas… Il ne l’avait pas plus trouvé là-bas qu’ici. Toujours le même nombre de visage, tous inconnus, avec peut-être le bon à l’intérieur. Peut-être.

William alla demander à une nouvelle personne, qui semblait plus encline à lui donner plus de détails sur la localisation dudit Paul Nevada. Et l’âme charitable lui donna même une description de celui qu’il cherchait. Le voila mieux armé pour le trouver. Et oui, il l’avait vu. A l’intérieur d’un bureau. Le jeune diplômé pénétra à l’intérieur, un grand sourire aux lèvres.

« Ouh, qu’il est dur de vous trouver ici. Je suis William McBurrough, Inspecteur de la Police de Londres diplômé de moins d’une semaine, grand brun aux yeux sombres, mais vous devez certainement le voir tout seul. Mes amis m’appellent Will – d’ailleurs, je peux vous appeler Pauly ? Ce sera plus sympa – ou encore Willy. Je suis Anglais d’origine Écossaise, mon père m’a appris à jouer de la cornemuse, et je suis Insp… Non, ça, je l’ai déjà dit. Le grand patron m’a écrit que je travaillerais avec vous. Ah oui, j’oubliais. Enchanté de vous rencontrer et de travailler avec vous, Pauly. »